Du SFW pour la XXX Party de Diesel : cachez donc ce sexe que je ne saurais voir !

septembre 28, 2008

Voici une vidéo diffusée sur la toile par la marque Diesel afin de promouvoir l’évènement qu’elle organise le 11 octobre : la Diesel XXX Party.

Le thème XXX a évidemment plus à voir avec le fait que la marque fête cette année ses 30 ans qu’avec le célèbre rôle incarné par Vin Diesel.

Il constitue surtout un hommage aux valeurs fondamentales de la marque, comme en témoigne le choix assumé de détourner un kitschissime porno des 70’s : le décalage, le sexe, la branchitude, le mélange des genres, et un esprit provocateur qui ne se refuse rien, pas même le mauvais goût…

Le spot surfe sur une tendance récente du web, le SFW. Cette dernière, nommée en opposition au traditionnel sigle NSFW censé désigner le contenu qui n’est pas approprié pour être consulté au bureau, détourne l’imagerie du porno en « habillant » les acteurs de façon ridicule à l’aide de grossiers logiciels de dessin.

Il est intéressant de constater qu’aujourd’hui la subversion change de sens. Signe d’une époque où la pornographie est banalisée, et d’une société dans laquelle les consommateurs sont blasés par l’omniprésence du sexe, la provocation consiste désormais à rendre inoffensives des images subversives. Ainsi, on se souviendra avec un certain dédain, teinté d’une curiosité pour la désuétude, du temps où certains s’amusaient encore à parsemer les Walt Disney d’images « subliminales » à caractère sexuel (cf. ci-dessous).

Avec le temps, chez les annonceurs, l’anniversaire de marque est devenu un véritable exercice de style. On mange de l’anniversaire prétexte à toutes les sauces, et les marques rivalisent de fadeur et de médiocrité. Diesel est l’une des rares marques chez lesquelles cet exercice souvent stéréotypé ne donne pas lieu à quelque chose de ringard.

Là où de nombreuses marques se content d’un blabla aussi rasoir que pompeux (à base de moi-je), Diesel a quelque chose à nous offrir : elle nous promet une soirée exclusive avec la crème des trendsetters (Pedro Winter, 2 Many Dj’s, etc.).

Par ailleurs, on ne perd pas de vue les objectifs marketing « conatifs » : les consommateurs sont invités à se rendre sur les points de vente ou à s’inscrire sur le site relationnel de Diesel pour espérer recevoir une invitation (ambiance ROI, parce que « faut pas déconner » quand même !).

La vidéo en soi, incitera beaucoup de bloggueurs à parler de l’évènement, sans compter qu’un post contenant les expressions « XXX » et « sexe » est particulièrement avantageux en termes de référencement et de trafic… Tout le monde s’y retrouve !!!


Du canal de distraction : la dernière campagne de Canal Plus

septembre 23, 2008

Voici un excellent spot pour la marque Canal Plus que je vous propose d’analyser en détail, en m’appuyant sur des outils conceptuels empruntés à Erving Goffman, afin d’en comprendre mieux les subtilités.

I – Quelques mots sur Erving Goffman

Goffman, dans Les cadres de l’expérience, propose une analyse des situations sociales en termes de cadres. Ces cadres, à la manière des cadres de l’univers cinématographique, sont des règles ou des points de vue qui orientent notre interprétation des situations. Selon lui, les activités sociales se composent à l’origine de cadres primaires sur lesquels sont opérées diverses « transformations » qui modifient le statut de l’activité.

Ainsi, par exemple, un combat n’aura pas le même statut s’il s’agit de 2 hommes qui se battent dans la rue, de 2 hommes qui se battent pour faire semblant, de 2 hommes qui se battent dans le cadre d’une rencontre sportive (ex : un match de boxe), ou encore de 2 hommes qui se battent dans le cadre d’une cérémonie rituelle (par exemple un rite tribal guerrier).

Les transformations sont de 2 types : les modalisations (comme par exemple lorsque l’on simule une activité « pour faire semblant ») et les fabrications (comme lorsque l’on retient une partie de l’information, par exemple dans les cas de manipulations).

II – Une publicité structurée par plusieurs strates de cadres

La publicité et les cadres dont elle se compose se structurent de la façon suivante.

La cadre primaire (ou coeur de l’activité) => Le dialogue entre Marie-Antoinette et le marquis.

Le cadre 2 => Une modalisation du cadre primaire => Un film qui met en scène le dialogue entre Marie-Antoinette et le marquis.

Le cadre 3 => Une modalisation du cadre 2 => Un récit, au sein d’une conversation entre deux femmes, qui décrit un film qui met en scène le dialogue entre Marie-Antoinette et le marquis.

Le cadre 4 (ou frange de l’activité) => Une modalisation du cadre 3 => Une publicité qui met en scène la conversation des deux femmes qui décrit le film qui met en scène le dialogue entre Marie-Antoinette et le marquis.

On distingue ici une mise en abîme de l’activité donnant lieu à une construction complexe : les différentes strates s’imbriquent les unes dans les autres comme des poupées russes.

III – Des cadres organisés dans le temps

Ces cadres sont aussi organisés dans le temps : la structure n’est pas donnée directement au spectateur, elle se déploie dans le temps, et ne se révèle qu’au fur et à mesure.

Temps 1 : ambiguïté

La première scène paraît pour le moins incongrue. On a le sentiment confus que quelque chose cloche, mais sans vraiment savoir pourquoi. Il s’agit là, selon la terminologie de Goffman, d’une situation d’ambiguïté : on ne sait pas d’emblée à travers quel(s) cadre(s) appréhender la situation (ex: l’exemple le plus classique de situation d’ambiguïté est lorsque que vous n’êtes pas en mesure de déterminer si votre interlocuteur, dans le cadre d’une conversation, est sérieux ou s’il plaisante).

L’ambiguïté (pour nous) résulte d’une interférence entre les cadres 2 et 3 : à l’origine distincts, ils se retrouvent fondus en un seul par le jeu poétique des signifiants.

Temps 2 : épuration des cadres

Intervient ensuite la révélation, ou l’explication de la situation. Dans un langage Goffmanien, on dit que le cadre est épuré, car il devient clair pour tout le monde. L’ambiguïté est levée. On comprend enfin ce qui se passe et l’on prend conscience de toutes les épaisseurs ou strates de l’activité : la situation initiale d’apparence absurde faisait en réalité référence à une conversation entre deux personnes.

IV – Mettre en scène le canal de distraction pour valoriser la promesse

Mais le niveau d’analyse ne suffit pas encore à comprendre l’effet surprenant et comique du spot. Il faut se plonger un peu plus avant dans la complexité de la situation.

Lors d’une situation sociale, une multiplicité de canaux de communications s’ajoute aux divers cadres, intervenant ainsi en parallèle de l’activité principale (ex : le canal de distraction, le canal de dissimulation, le canal de direction, le canal de superposition…).

L’effet humoristique de la publicité vient de l’irruption inattendue et importune du canal de distraction (le souffle des joggueuses, appartenant au cadre 3) au sein même de l’intrigue du film (cadre 2).

Le résultat qui s’en suit est une inscription de la situation d’énonciation au cœur même de l’énoncé. Elle est la trace du narrateur, ou émetteur construit, et elle fait apparaître le processus de communication dans toute l’épaisseur de son contexte.

Ce procédé met en évidence le lien indissoluble qui lie certains films (les bons) à leur contexte de consommation. Les bons films, ceux « dont on parle » et qui passent sur Canal Plus, constituent une forme de ciment social. Par ailleurs, ils sont tellement riches en émotions que leur simple récit suffit à immerger totalement les consommateurs, au canal de distraction près toutefois…


Le(s) mythe(s) du Moi vu par Erving Goffman

septembre 18, 2008

Voici un extrait des Cadres de l’expérience d’Erving Goffman qui nous invite à remettre en question nos croyances invétérées en notre « bon vieux moi », comme dirait Nietszche.

Tout comme il y a, chez lui, toujours un masque derrière le masque, ainsi qu’une autre caverne derrière la précédente, Goffman attire notre attention sur le fait que l’auteur que l’on croît apercevoir en filigrane derrière chaque représentation est aussi construit et fictif que son narrateur et ses personnages.

N’en déplaise aux grands naïfs, le moi n’a rien d’une essence, malgré ce que suggère parfois la distance que prennent les acteurs (sociaux) avec leurs rôles respectifs…

«  Cette distance entre la personne et le rôle, cet interstice par où le soi vient jeter un coup d’œil furtif, cette touche d’humanité ne dépend pas plus de ce qui est extérieur à la situation que le rôle.

Nous ne nous préoccupons jamais vraiment de ce qu’est « réellement » un participant et, même si nous pouvions le savoir, il est probable que nous ne nous y intéresserions guère. Ce qui nous préoccupe, c’est l’impression qu’il nous donne d’être une certaine personne derrière le rôle qu’il tient. Ce qui nous intéresse, pour reprendre les termes de Gibson, c’est le poète et non celui qui décide d’écrire des sonnets. C’est l’auteur et non l’écrivain. C’est ce que son comportement génère à différents niveaux.

Ce que nous y glanons renvoie certes à un soi au-delà de la situation, mais un soi qui fluctue à chaque nouvelle situation […] Mais il n’y a aucune raison de penser que ces bouts de soi qu’on offre à autrui, ces petites révélations à propos de ce que nous sommes sur d’autres scènes ont quoi que ce soit en commun.

Nos impressions nous conduisent certes à dire qu’il y a quelque chose à l’extérieur de la situation et qu’on retrouvera sans doute avec d’autres impressions, mais on ne peut dire qu’elles convergent sur un point, alors que c’est précisément leur caractéristique majeure d’apparaître comme convergeant toutes sur un même point.

Faire une remarque choquante, ironique, étudiée ou pleine de finesse, ce n’est pas révéler ou dissimuler ce qu’on est vraiment : une remarque (ou un roman) ne peut rien faire de tel. C’est conforter l’impression qu’il y a en nous un personnage, un poète ou un auteur qui possède ces qualités. »

Erving Goffman – Les cadres de l’expérience, (p291)


Marketing as a service

septembre 9, 2008

Voici un extrait d’un article édifiant publié dans Adage le 28 juillet dernier et écrit par Drew Neisser, CEO de l’agence Renegade :

« It’s just common sense that if you give a little, you’ll usually get a little in return. But to paraphrase President Harry S. Truman, that (inadvertent) font of marketing wisdom, « If common sense were so common, more [marketers] would have it. » Marketing is nothing more or less than an exchange of value. The better the value the marketer provides, the more time and attention they’ll usually get back from their target. If the value delivered by the marketer is exceptional, then the consumer will pay back the marketer with loyalty and brand evangelism in good times and bad.

Marketing as service is about transforming your communications from mere messaging into an exceptional value that consumers will seek out. To quote Ad Age Editor Jonah Bloom, « Marketing as service is where brands actually give consumers something they want or need, » as opposed to hitting them over the head with messaging they’d rather zap or ignore. While Ad Age and others have chronicled examples of this savvy approach, no one to my knowledge has put forth a how-to guide for marketing as service, so let’s just say, the buck starts here. »