Spintank décrypte les plateformes communautaires de marques dans son dernier livre blanc

mars 10, 2010

J’ai assisté hier à la présentation du dernier livre blanc de l’agence Spintank, « Plateformes communautaires et stratégies de communication en ligne ».

Le contenu de ce dernier étant particulièrement intéressant, du fait, notamment, de l’effort de synthèse et de structuration dont il témoigne, je souhaite partager ici les notes que j’ai prises.

DE QUOI S’AGIT-IL ? POURQUOI LE LIRE ?

Ce livre blanc vient approfondir et compléter une étude quantitative, réalisée en partenariat avec Opinion Way, qui a été publiée il y a peu.

Il permet d’en remettre en perspective les résultats et d’interpréter avec plus de recul certains de ses chiffres qui avaient tendance à aplanir la réalité des pratiques (je reviendrai peut-être sur ce sujet ultérieurement si j’en ai le temps ou le courage).

Son ambition est d’éclairer ses lecteurs sur la diversité des plateformes communautaires de marques existantes et sur les principales interactions et promesses qu’elles proposent.

Il formalise ce sujet chaotique de façon claire et efficace en répondant à des questions simples :

– quels sont les différents types de plateformes ?

– qu’est-ce qu’on y fait ?

– à quelles marques ou entreprises sont-ils destinés ?

– quels sont les facteurs clés qui permettent d’en maximiser le succès ?

La typologie proposée fonctionne bien. Elle a le mérite de s’intéresser davantage aux pratiques et aux usages qu’à la technologie, et de ne pas se contenter d’un simple catalogue de dispositifs (voir la méthode P.O.S.T. de Forrester pour ceux que cette problématique intéresse).

Bref, ce livre constitue une excellente entrée en matière pour les annonceurs et un bel outil de pédagogie client pour les agences.

LA METHODOLOGIE

La typologie sur laquelle le livre s’appuie a été réalisée grâce à un corpus de 30 plateformes sélectionnées pour leur succès, leur volume de contributions significatif et leur pérennité.

La démarche est qualitative, chaque famille est un « idéal type » permettant d’interpréter des cas concrets qui relèvent souvent de plusieurs catégories à la fois.

LA TYPOLOGIE DES PLATEFORMES COMMUNAUTAIRES

La typologie est structurée par deux axes principaux :

– « Le sujet » des plateformes, la thématique qui préside au regroupement de la communauté, et qui peut selon les cas prendre plus ou moins de hauteur face au discours de marque et au discours produits.

– Ex: une marque qui parle d’elle VS une marque qui parle d’une problématique proche de ses valeurs ou de son métier VS une marque qui parle de sujets citoyens.

– « La promesse » des plateformes, le type de valeur ajoutée ou de relation qui est proposée aux internautes, et qui peut témoigner d’un engagement plus ou moins fort des marques.

– Ex: une marque qui se contente de diffuser de l’information VS une marque qui implique ses consommateurs dans l’évolution de l’entreprise via la co-création.

Elle met au jour les 5 familles suivantes :

1. Les réseaux d’utilisateurs

2. Les laboratoires de co-création

3. Les plateformes citoyennes

4. Les communautés d’entraide

5. Les services d’expertise et d’accompagnement


1. Les réseaux d’utilisateurs

Quoi : des plateformes qui constituent des extensions des produits et des services des marques et qui délivrent un supplément de valeur ajoutée aux clients de ces dernières.

Pourquoi : enrichir la valeur d’un produit ou d’un service et fidéliser les clients.

Pour qui : les marques, produits ou services qui ont un certain potentiel affinitaire ou sont susceptible de développer un sentiment d’appartenance, les entreprises qui visent des niches.

Comment : opter pour une approche d’abord communautaire avant d’être commerciale, être à l’écoute des usages de la cible, identifier clairement le bénéfice client, etc.

Exemples : Nike+, Carnival Cruise

2. Laboratoire de co-création

Quoi : des plateformes surfant sur la vague du crowdsourcing et qui demandent aux consommateurs leurs avis pour faire évoluer une entreprise, ses produits, ou ses services.

Pourquoi : disposer d’un panel permanent de consommateurs pour tester des idées ou des services, mieux connaître ses clients, innover, fidéliser les fans.

Pour qui : des entreprises dont l’offre est suffisamment large et qui s’adressent à un public suffisamment important pour que le volume de contributions soit significatif.

Comment : proposer une grande variété d’interactions (voir le Social Technographics report de Forrester), s’engager à mettre en œuvre une partie des suggestions des consommateurs, animer et mettre à jour régulièrement la plateforme, ne pas censurer les participants, répondre aux critiques, récompenser les contributeurs…

Exemples : Dell Ideastorm, Mystarbuck Idea, Lego…

3. Les plateformes citoyennes

Quoi : des plateformes qui initient un échange sur une thématique citoyenne engageant  la responsabilité sociale de l’entreprise.

Pourquoi : améliorer l’image et la réputation d’une entreprise.

Pour qui : des dispositifs à double tranchant au-dessus desquels plane le spectre du greenwashing et qui peuvent s’avérer dangereux pour les marques. Ils s’adressent par conséquent à des marques capables de jouer le jeu à fond. De plus ils sont réservés aux entreprises qui disposent d’une légitimité suffisante dans le domaine concerné.

Comment : prouver l’engagement de la marque par des actes tangibles et ne pas rester au stade du wishful thinking, devenir un média sur la thématique concernée (diffusion de contenu)…

Exemple : Chevron – Will you join us

4. Les communautés d’entraide

Quoi : des plateformes qui fédèrent une communauté autour d’un centre d’intérêt commun indirectement lié à l’univers d’une marque ou à son métier. Il s’agit d’aider la communauté à s’organiser et à échanger informations, conseils et services.

Pourquoi : permettre à une entreprise de renforcer sa relation avec ses publics clés (pas nécessairement ses clients), préempter un territoire. Une démarche indirecte, à la manière des démarches de mécénat.

Pour qui : convient particulièrement aux entreprises b2b, mais pas seulement. Intéressant pour tous acteurs qui peuvent répondre à un besoin communautaire insatisfait au sein de leurs publics.

Comment : répondre à un besoin de structuration de communauté préexistant, viser un public « utile » pour la marque, proposer des services et contenus à valeur ajoutée, ne pas entrer d’abord par une démarche commerciale. Des dispositifs dans lesquels la marque est souvent en retrait pour mieux permettre aux membres de la communauté d’échanger et développer une relation horizontale.

Exemple : Les végétaliseurs (Yves Rocher, plus de 60 000 personnes)

5. Les services d’expertise et d’accompagnement

Quoi : des plateformes insérées dans une démarche plus « verticale » qui offrent à des communautés l’accès à diverses sources d’expertise dans un domaine donné. Il peut s’agir de faire parler des experts, de proposer des services de coaching ou encore d’une démarche de service après vente dans laquelle les spécialistes de la marque répondent aux questions des clients.

Pourquoi : adopter / accéder à une posture de référent dans un domaine particulier.

Comment : donner accès à des experts qui font autorité dans leur domaine, ne pas se positionner sur un besoin déjà satisfait par la concurrence en ligne…

Exemples : Being Girl (P&G), Opinions & Débats (SNCF)

LES 10 REGLES D’OR

– Tenir compte de la concurrence en ligne (ne pas se proposer de faire ce que d’autres, marques ou pas, font déjà beaucoup mieux que vous)

– Bien estimer le désir de participation (ce n’est parce que je propose un espace que les gens vont venir et contribuer)

– Adapter l’outil à un besoin identifié

– Prendre la parole là où on est légitime

– Incarner la promesse (montrer patte blanche, donner des preuves concrètes)

– Accepter de révéler l’opinion

– S’engager (impliquer l’entreprise en profondeur afin que l’activité de la communauté puisse avoir une incidence concrète sur elle)

– Animer (un Cub Med sans GO va vote être déserté…)

– Piloter (mesurer, écouter, évaluer et faire évoluer le service en continu en adoptant une logique de test and learn)

– Valoriser la plateforme (Médiatiser la plateforme et l’activité de la communauté)

CONCLUSIONS

– Une forte attente de transaction et de valeur ajoutée de la part des consommateurs

– un internaute ne dépense pas du temps sur la plateforme d’une marque « pour rien », il doit être motivé par une offre de valeur ajoutée, la marque doit impérativement donner quelque chose (Information, transparence, contenus, services…). Il ne vient pas juste pour bavarder.

– Comme l’ont joliment dit les intervenants : « Il n’y a pas de dialogue, il n’y a que des preuves de dialogue. Il n’y a pas d’écoute, il n’y a que des preuves d’écoute, etc. »

– Des initiatives qui doivent impérativement être conçues sur-mesure

– une plateforme communautaire de marque bien pensée n’est pas seulement une plateforme qui s’attaque à une thématique sur laquelle ma marque est légitime. Une plateforme authentiquement pertinente est une plateforme que je devrais être le seul à pouvoir faire.

– Aujourd’hui le patrimoine d’une marque n’est plus (seulement) son identité mais son capital humain (communautés, consommateurs, fans, publics, employés, etc.).
– S’il est difficile d’établir le ROI précis d’une initiative communautaire, il est clair que les entreprises qui font l’impasse sur le web communautaire aujourd’hui se préparent des lendemains difficiles…

– Se donner les moyens de réussir en poussant la démarche à fond (médiatisation, transparence, réactivité, etc.), pour ne pas gonfler les rangs des dispositifs participatifs sans participants…

– Des plateformes dont le rôle est complémentaire de celui des médias sociaux (un thème complexe qui pourrait en soi être le sujet d’un nouveau livre blanc…).